Chez le coiffeur
(la coiffeuse) Bonjour Madame Neige !! ça faisait longtemps !
(moi) bah que voulez-vous, quand on a comme moi une si belle nature de cheveux, on n’a pas besoin de venir souvent, ahahaha !
(la coiffeuse me débarrasse de mon blouson - eh oui, ya pas si longtemps j’étais en robe dos nu et voilà brusquement qu’octobre se met à ressembler à octobre ! pft !) installez-vous, Madame Neige ! (puis, m’ébouriffant - si tant est qu’on puisse ébouriffer trois tifs qui se battent en duel) oh-oh !! que vois-je ? des cheveux blancs !
(moi) ah ? j’ai des cheveux blancs ?
(la coiffeuse) oui bon, pas autant que Madame Tartenpino.. (puis, se tournant vers une autre cliente qui est en train de se faire bigouder, la coiffeuse hurle) hein Madame Tartenpino ?? (à moi) vous comprenez, elle est âgée Madame Tartenpino, elle s’ennuie chez elle alors on a pitié, on la garde le plus qu’on peut, ça lui passe le temps ..(puis, reprenant un timbre de voix normal, c’est-à-dire qu’elle me hurle dans l’oreille) alors on commence par une couleur ??
(moi) allons-y pour la couleur ..
(la coiffeuse) marronnasse, comme la votre ?
(moi) marronnasse ?? bah je vous remercie ! c’est ma couleur naturelle !!
(la coiffeuse) marronnasse, marron glacé, vous êtes bien marron glacé non ?
(moi) j’ai toujours eu l’illusion que j’étais châtain, mais si vous dites que je suis marron glacé ..
(la coiffeuse) bon je vous prépare ça Madame Neige (puis, hélant la petite stagiaire) Mathiiiiiiiiiilde ! tu viens mettre la couleur de Madame Neige !
(Mathilde, d’une gentille petite voix) heu, vous voulez bien vous baisser ?
(moi) pardon ?
(Mathilde) heu, oui, descendez un peu parce que vous comprenez, je suis trop petite et je ne vois pas le dessus de votre tête ..
(moi, glissant jusqu’à avoir les fesses à ras du fauteuil) heu, ça vous va comme ça ? (j’ose pas imaginer la tronche que je dois avoir dans cette position, mais Mathilde semble on ne peut plus satisfaite et elle m’applique consciencieusement sur le crâne une teinture que j’appellerai plutôt moutardasse. Lorsque je me redresse je me rends compte en voyant mon reflet dans le miroir qu’elle m’a dressé les cheveux tout autour de la tête, comme un soleil).
(moi) oh bah dites donc, chui super chouette comme ça !
(Mathilde, super sérieuse) faut pas vous inquiéter, on va pas vous laisser comme ça !
(moi) ah bon ! ouf !
Après les vingt minutes de pause et un shampooing sans histoire ..
(la coiffeuse) je vous les coupe ?
(moi) heu, en même temps c’est un peu pour ça que je suis là ! alors, vous me les faites ultra-courts, avec le dessus en brosse..
(la coiffeuse, s’esclaffant) Madame Neige, ahahaha, Madame Neige !!!! toujours le mot pour rire !!!! allez, je vais vous les faire comme d’habitude, en pétard !
(moi) en pétard ? j’ai les cheveux en pétard moi ?
(la coiffeuse m’ébouriffe) (c’est une manie) (puis soudain grave) c’est quoi ça ?????
(moi) quoi, quoi ça ??
(la coiffeuse, louchant sur l’arrière de mon crâne) ça !!! ce trou, là, derrière la tête !
(moi) aaaaaaaaaaaaah, ça !!!! mais c’est rien !
(la coiffeuse) rien, ce trou ??
(moi) de toutes façons vous allez tout couper.. j’ai juste avancé les opérations..
(la coiffeuse) parce que c’est vous qui avez fait ça ??
(moi) ben oui, je trouvais mes cheveux un peu longs derrière, alors je les ai coupés..
(la coiffeuse) toute seule ? mais vous savez que j’aurais presque pu ne pas pouvoir rattraper le coup, avec le peu de cheveux que vous avez ?
(Super. En plus d’être marronnasse je suis à moitié chauve)(heureusement, Mathilde s’approche de la coiffeuse et fait diversion) le séchoir de Madame Tartenpino s’est éteint, je lui enlève ses bigoudis ?
(la coiffeuse) non non, laisse-la encore un peu ! (à moi) vous comprenez, elle est âgée Madame Tartenpino, chez elle elle s’ennuie … on a du cœur quand même ..
(moi) vous la trouvez pas un peu rouge ?
(la coiffeuse) oh lala en effet, elle est archi cuite ! (à la stagiaire) Mathiiiiiiiilde, enlève Madame Tartenpino du séchoir !!!! et tu lui retires les bigoudis ! tranquillement hein, elle a le temps Madame Tartenpino ..(puis hurlant) hein Madame Tartenpino ? (puis, en m’ébouriffant encore une fois) bon, qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire avec ça ?
A partir de là, tout va très vite. Les doigts de la coiffeuse volent, virevoltent, elle est en pleine création artistique, c’est tout juste si on ne voit pas de la fumée sortir de son front tellement sa concentration est intense. Elle me finit au sèche-cheveux, "effet naturel pétard", dixit car impossible de faire un brushing sur ce carnage (dixit itou). Elle place le miroir derrière moi et me demande si ça me convient d’un ton qui n’accepte aucune réplique. Puis elle me retire l’informe peignoir dont j’étais affublée et me laisse me diriger vers la caisse où malgré mes protestations, elle ne me fait même pas de remise bien que je lui avais commencé le travail..
Une fois dehors, un énorme coup de vent et une sympathique averse automnale achèvent mon "effet naturel pétard" ..